Autour de
Saïda, dans l'Atlas tabulaire couvert en partie par la "Ghaba", vivaient,
en 1962, les Doui Thabet dans les Monts de Daya et les Hassasna Gharaba
dans les Monts de Saïda. A l'ouest, les Doui Thabet coupent un des chaînons
de l'Atlas tabulaire qui se maintient ici à 1000-1200 mètres d'altitude.
D'accès difficile et coupée de ravins, cette région offre un aspect jurassien,
avec ses plateaux gréso-calcaires, alternant avec quelques crêtes massives,
plissées et faillées, ceinturées de falaises et d'éboulis. En particulier,
le djebel Abl-el-Krim, avec ses 1200 mètres, domine la plaine de Saïda.
Ces sommets portent des noyaux de grands bois de pins d'Alep, entourés
d'une couronne de maquis de thuyas. Les dépressions sauvages sont envahies
par une brousse dense de cistes à gomme, cistes blancs, bruyères; le diss
dresse ses feuilles étroites à mi-poitrail de cheval. Là, s'établit un
damier irrégulier de clairières, de parties incendiées, de vieux peuplement
végétal, de jeunes semis naturels et de beaux perchis.
En 1847, la forêt occupait encore 15000 hectares mais elle a été attaquée
depuis par les incendies accidentels et l'ancienne pratique indigène de
la culture sur brûlis. Depuis l'arrivée des premiers colons européens,
en 1904, les défrichements ont ouvert de larges clairières et, dés 1936,
les grands bois ne représentaient guère plus de 6 pct de la superficie totale,
le maquis 20 pct, la brousse 25 pct, les terrains de parcours et de cultures
49 pct soit 5000 hectares.
Entre les vallées des oueds Sefioun et Saïda, la forêt s'éclaircit et
les dépressions fertiles, défrichées, sont piquetées de bouquets d'arbres,
d'arbustes isolés et de broussailles. Les terres, achetées, défoncées
et préparées par les Européens, étaient livrées à la culture des céréales:
blé tendre, orge, avoine, avec quelques rangées de vignes. Une quarantaine
de colons y possédaient des propriétés de 500 à 1000 hectares. Leurs petites
fermes groupaient une centaine d'habitants dans des exploitations agricoles
composées d'une modeste maison d'habitation à rez-de-chaussée, écurie
à juments poulinières, étable à vaches, enclos à moutons et porcherie.
Cette jeune économie agricole était polyvalente. Des charbonniers espagnols
échangeaient: bois, charbon de bois, écorce à tan, alfa, palmier nain,
cueillis par les indigènes, contre des produits alimentaires: sucre, semoule,
café et thé. Ces trafiquants occupaient des gourbis temporaires en bois.
Les Musulmans vivaient de la culture extensive des céréales -un tiers
de la superficie- en blé dur et orge. Prés des sources, quelques petits
jardins potagers, irrigués, travaillés avec soin par des nègres, venus
de l'extrême sud des Gourari, vivant dans une étroite paillote conique
confectionnée en diss. Ceux-ci produisaient: piments, tomates, courges,
pastèques.
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