Saïda l'heureuse
Chapitre 10

Saïda doit sa prospérité à sa position géographique qui, de bonne heure, en a fait un carrefour pour les pistes arabes, mal tracées, qui la reliaient à Mascara, capitale du Beylick de l'ouest, au XVllle siècle, et permettaient les déplacements, souvent peu pacifiques, des tribus chamelières des Hauts plateaux.

Aujourd'hui, c'est un important carrefour routier, équipé par la France, conduisant: au nord vers Mascara à 70 kms par une route construite dès 1844 par le Génie militaire et de bonne tenue, au nord-ouest vers Sidi-Bel-Abbès à 98 kms par Berthelot (Ain-Beida) et Baudens (El-Ksar), au nord-est vers Tiaret à 156 kms. Au seuil du Sersou, par Frenda, au sud-ouest vers Marhoum, par Ain-el-Hadjar et Wagram, à la limite du Tell et de la Steppe, vers Géryville et le Djebel Amour, à 190 kilomètres, par Ain-el-Hadjar, le Kreider sur le Chott-ech-Chergui et Alfaville, au sud-ouest vers El-Aricha, poste militaire et gare ferroviaire, à 137 kms par la Rocade sud, le Telagh, Bossuet (Daya) et son dépôt de la Légion, Bedeau d'où l'on peut gagner Berguent au Maroc, au sud-est vers Ain-Sefra, à 235 kms au coeur de l'Atlas pré-saharien des Ksours, d'où l'on peut gagner Kenadsa au Maroc vers Beni-Ounif et Figuig,

Saïda est également une gare importante, placée sur un grand axe ferroviaire, avec la ligne de pénétration nord-sud, reliant les ports d'Oran, Arzew et Mostaganem à Colomb-Béchar, sur une longueur de 750 kms. Jalonnée de gares fortifiées et autant de points d'eau, cette ligne saïdèenne fonctionnait en semaine en 1955 sur un trajet de 15 heures, assuré par le train direct avec couchettes.

La section Mécheria Ain-Sefra a été construite dès 1887 par la Compagnie Alfatière Franco-Algérienne. Cette société financière, épaulée par le journal parisien "La Presse" (fondé en 1836), était présidée par l'ingénieur de travaux publics Debrousse, constructeur audacieux du barrage de l'oued Fergoug, en amont de Perrégaux, de 1865 à 1867, et réalisateur de la prospérité de la région de l'Habra-Macta jusqu'en 1874. A cette dernière date, il obtint par la Compagnie Franco-Algérienne, la concession du chemin de fer d'Arzew à Saïda et Géryville pour l'exploitation de l'alfa, avec privilège "exclusif" sur 300000 hectares et l'utilisation du port d'Arzew pour l'exportation de cette graminée.

La gare de Bou-Ktoub correspond à un centre de transit de l'alfa et à Ain-Sefra, une liaison automobile existait vers Gao sur le Niger, à 2372 kms par Colomb-Béchar. Cette dernière station, terminus des chemins de fer algériens, était prolongée jusqu'à Abdala, à 91 kms tète de ligne de l'ébauche du Trans-Sahara-Niger, resté à l'état de projet. Rappelons, enfin, qu'il existait des aérogares à Saïda, Bou-Ktoub, Mécheria et Ain-Sefra, desservis d'une part, d'Oran à Colomb-Béchar, par service direct, une fois par semaine et, d'autre part, par service direct, également hebdomadaire, de Colomb-Béchar à Alger.

Déjà, en 1847, Saïda était un marché d'échanges entre les produits des sédentaires du Tell et ceux des nomades caravaniers du Sud: chevaux, bestiaux, laine, tapis de laine de la Kalaa des Beni Rached, moutons, volailles, beurre, oeufs, sel, peaux d'une part, grains, étoffes, fruits, légumes, charbon de bois de l'autre. Ce trafic fut assuré, plus tard, par les routiers espagnols. En 1962, grâce aux importants réseaux de communication routière et ferroviaire, construits par les Français, Saïda était devenue un important centre commercial, où parvenaient les produits de la Métropole, importés par les ports d'Oran et de Mostaganem, et ceux du Tell agricole: fruits, légumes, primeurs, céréales, produits tropicaux (café, thé, sucre, épices), farines et semoules, huiles, vins, grains, tissus européens et indigènes, machines agricoles, matériaux de construction, charpentes métalliques.

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